État-tampon issu du Congrès de Vienne (1815), le grand-duché de Luxembourg a pour souverain le roi des Pays-Bas mais fait également partie d'une Confédération germanique et doit, à ce titre, accepter sur son petit territoire une garnison prussienne.
En 1867, l'empereur des Français Napoléon III confie au chancelier prussien Otto von Bismarck son désir d'être récompensé pour sa médiation dans la guerre entre l'Autriche et la Prusse. Le Luxembourg paraît être un « pourboire » acceptable et la France pourrait l'acheter au roi des Pays-Bas.
Cependant, lorsque ce projet est communiqué à l'opinion publique allemande, celle-ci s'oppose catégoriquement à cette cession, considérant le Luxembourg comme un territoire historiquement allemand.
Pour régler cette crise, une conférence réunit à Londres les principales puissances (Autriche, Belgique, France, Italie, Pays-Bas, Prusse, Royaume-Uni, Russie).
Par un traité signé le 11 mai 1867, la France renonce à l'annexion du Luxembourg, en échange de quoi la Prusse retire ses garnisons du grand-duché de Luxembourg, lequel est déclaré neutre et peut dès lors savourer une pleine indépendance.
Traité de Londres du 11 mai 1867
Article premier :
S. M. le Roi des Pays-Bas, Grand-Duc de Luxembourg, maintient les liens qui attachent ledit Grand-Duché à la Maison d'Orange-Nassau, en vertu des traités qui ont placé cet État sous la souveraineté de S. M. le Roi Grand-Duc, ses descendants et successeurs.
Les droits que possèdent les Agnats de la Maison de Nassau sur la succession du Grand-Duché, en vertu des mêmes traités, sont maintenus.
Les Hautes Parties Contractantes acceptent la présente déclaration et en prennent acte.
Article 2 :
Le Grand-Duché de Luxembourg, dans les limites déterminées par l'Acte annexé au traité du 19 avril 1839 sous la garantie des cours de France, d'Autriche, de la Grande-Bretagne, de la Prusse et de Russie, formera désormais un État perpétuellement neutre. Il sera tenu d'observer cette même neutralité envers tous les autres États.
Les H.P.C. s'engagent à respecter le principe de neutralité stipulé par le présent article.
Le principe est et demeure placé sous la sanction de la garantie collective des Puissances signataires du présent traité, à l'exception de la Belgique, qui est elle-même un État neutre.
Article 3 :
Le Grand-Duché de Luxembourg étant neutralisé aux termes de l'article précédent, le maintien ou l'établissement de places fortes sur son territoire devient sans nécessité comme sans objet.
En conséquence, il est convenu d'un commun accord, que la ville de Luxembourg, considérée par le passé, sous le rapport militaire, comme forteresse fédérale, cessera d'être une ville fortifiée.
S. M. le Roi Grand-Duc se réserve d'entretenir dans cette ville le nombre de troupes nécessaires pour y veiller au maintien du bon ordre.
Article 4 :
Conformément aux stipulations contenues dans les articles 2 et 3, S. M. le Roi de Prusse déclare que ses troupes actuellement en garnison dans la forteresse de Luxembourg recevront l'ordre de procéder à l'évacuation de cette place immédiatement après l'échange des ratifications du présent traité.
On commencera simultanément à retirer l'artillerie, les munitions et, tous les objets qui font partie de la dotation de la dite place forte.
Durant cette opération, il n'y restera que le nombre nécessaire pour veiller à la sûreté du matériel de guerre et pour en effectuer l'expédition qui s'achèvera dans le plus bref délai possible.
Article 5 :
S. M. le Roi Grand-Duc, en vertu des droits de souveraineté qu'il exerce sur la ville et forteresse de Luxembourg s'engage de son côté à prendre les mesures nécessaires afin de convertir ladite place forte en ville ouverte, au moyen d'une démolition que sa Majesté jugera suffisante pour remplir les intentions des H.P.C exprimées dans l'article 3 du présent traité. Les travaux requis à cet effet commenceront immédiatement, après la retraite de la garnison. Ils s'effectueront avec tous les ménagements que réclament les intérêts des habitants de la ville.
S. M. le Roi Grand-Duc promet en outre que les fortifications de la ville de Luxembourg ne seront pas rétablies à l'avenir, et qu'il n'y sera maintenu ni créé aucun établissement militaire.
Article 6 :
Les Puissances signataires du présent traité constatent que la dissolution de la Confédération germanique ayant également amené la dissolution des liens qui unissaient le Duché de Limbourg, collectivement avec le Grand-Duché de Luxembourg, à ladite Confédération, il en résulte que les rapports dont il est fait mention aux articles 3, 4 et 5 du traité du 19 avril 1839 entre le Grand-Duché et certains territoires appartenant au Duché de Limbourg ont cessé d'exister, lesdits territoires continuant à faire partie intégrante du Royaume des Pays-Bas.
Article 7 :
Le présent traité sera ratifié et les ratifications en seront échangées à Londres, dans l'espace de quatre semaines, ou plus tôt, si faire se peut.
En foi de quoi, les Plénipotentiaires respectifs l'ont signé et y ont apposé le sceau de leurs armes.
Fait à Londres le 11 mai, l'an de grâce 1867.
Voir également : 9 juin 1815 - Fin du Congrès de Vienne