Le 7 novembre 1987, Habib Bourguiba, président à vie de la Tunisie, surnommé le « Combattant suprême » en raison de son combat pour l'indépendance du pays, est déposé par son Premier ministre, Zine el-Abidine Ben Ali (51 ans), qui fait valoir un empêchement dû au grand âge (84 ans) et à une santé défaillante.
Le vendredi 6 novembre 1987, vers 13 heures 30, avant d’aller faire la sieste, Bourguiba confie à Saïda Sassi sa décision de nommer un nouveau Premier ministre dès la première heure du lendemain.
L’information est immédiatement transmise à qui de droit. Sans perdre de temps, Ben Ali, qui est non seulement Premier ministre, mais aussi ministre de l’Intérieur, ne l’oublions pas, se rend Place d’Afrique et convoque son condisciple de Saint-Cyr, Habib Ammar, commandant de la Garde nationale. Ils s’isolent pendant tout le reste de l’après-midi et mettent au point un plan de destitution de Bourguiba. Vers 18 heures, chacun d’eux regagne son domicile. À 20 heures, ils se retrouvent au même ministère, après avoir pris chacun une collation, une douche et s’être armé d’un revolver pour pouvoir se suicider en cas d’échec.
Dans la nuit, un groupe de sept médecins tunisiens signent un rapport médical qui certifie l’incapacité mentale du président, Habib Bourguiba, d'assumer ses fonctions.
Ben Ali fait jouer l'article 57 de la constitution et prend en main le pays. Il devient, en tant que successeur constitutionnel, président et chef suprême des forces armées.
Le nouvel homme fort du pays justifie ce qui ressemble à un coup d'État par la crainte d'une guerre civile avec les islamistes du mouvement Ennahda. Avec un incontestable savoir-faire, Ben Ali, qui fut auparavant général puis ministre de l'Intérieur, va neutraliser les islamistes en douceur et engager la Tunisie dans la voie du libéralisme économique tout en maintenant une forte pression policière.
Le pays, sous sa férule, connaît une rapide modernisation, tant sur le plan économique que sur celui des moeurs. Il se rapproche des normes européennes par le niveau d'éducation comme par l'indice de fécondité (2 enfants par femme en 2009). On peut y voir le résultat d'un effort engagé dès l'indépendance, sous la présidence de Bourguiba.
Mais, à partir de la fin des années 1990, le président et sa famille, protégés par la censure, profitent de leur situation pour s'enrichir sans vergogne jusqu'à l'explosion révolutionnaire de janvier 2011.