Le mardi 29 août 1944, à l'approche de l'armée américaine, des soldats allemands instaurent la terreur dans la vallée de la Saulx, suite à des actes de résistance. 86 habitants de 16 à 85 ans des communes de Couvonges, Robert-Espagne, Beurey-sur-Saulx, Mognéville, et Trémont-sur-Saulx sont abattus et plusieurs centaines de maisons brûlées (54 maisons sur 60 détruites à Couvonges, 200 sur 300 à Robert-Espagne).
Arrivée en Lorraine de troupes venues d'Italie
Au début août 1944, Hitler décide de faire venir en France la 3e division de Panzergrenadiers qui est alors en Italie, dans la région de Florence. L'un de ses régiments, le 29e régiment de Panzergrenadiers, arrive ainsi au sud-ouest de Bar-le-Duc (Meuse) le 28 août.
Il répartit ses différentes unités dans plusieurs villages situés entre Bar-le-Duc et Saint-Dizier (Haute-Marne), notamment dans la vallée de la Saulx. Compte tenu de l'avance alliée, la mission de ce régiment n'est plus d'engager le combat contre les Américains mais de couvrir la retraite d'autres unités allemandes. Il s'agit de leurrer les Alliés en faisant croire à une présence ennemie plus importante qu'elle n'est en réalité.
Dès le 29 août au matin, plusieurs unités de ce régiment, équipées de véhicules blindés légers, se préparent à remplir leur mission. Elles quittent leur cantonnement pour faire mouvement vers l'ouest, en direction de Vitry-le-François. Un de leurs convois circule dans la forêt à proximité de Robert-Espagne mais il est attaqué par un petit groupe de résistants locaux. Un officier allemand donne aussitôt l'ordre de bloquer l'accès aux villages qu'il allait traverser, tous dans la Meuse et dans la vallée de la Saulx.
La tuerie de la vallée de la Saulx
Quatre villages sont particulièrement visés : Robert-Espagne, Beurey-sur-Saulx, Couvonges et Mognéville.
À chaque fois, les soldats empêchent toute personne d’en sortir ou d’y pénétrer. À midi, ils raflent les hommes rentrés manger chez eux. Ils fouillent systématiquement les maisons et mettent le feu aux maisons en lançant des plaquettes incendiaires. Les femmes et les enfants fuient sur les hauteurs dominant la vallée. À Robert-Espagne, Couvonges et Mognéville, les hommes raflés sont rassemblés sous bonne garde. Dans les deux premières localités, ils seront abattus vers 15 heures à l’aide de mitrailleuses. À Mognéville, un notaire qui parle allemand parvient à négocier la libération des otages mais une femme et deux hommes perdront néanmoins la vie dans ce village. À Beurey-sur-Saulx, plusieurs Malgré-nous parviennent discrètement à dire aux villageois de fuir. Dans ce village, les 6 victimes du 29 août seront 5 vieillards et une jeune fille, abattus devant leur maison en flammes ou tués dans une tranchée-abri. À Robert-Espagne, 49 hommes sont fusillés et un autre abattu dans une rue. À Couvonges, 26 hommes sont fusillés.
À Trémont-sur-Saulx, une localité voisine de Robert-Espagne, une jeune fille de 16 ans a eu la malchance d'être aperçue par des soldats du 29e qui l'abattent.
Responsabilités et poursuites
Après Oradour-sur-Glane (Haute-Vienne), Maillé (Indre-et-Loire), Tulle (Corrèze) et Ascq (Nord), la vallée de la Saulx (à la limite entre les départements de la Marne et de la Meuse) figure parmi les cinq grands massacres commis en France par les Allemands en 1944.
Alors que les premiers sont l’œuvre des SS, celui de ces villages meusiens a été commis par des militaires de la Wehrmacht.
L'enquête permit d'identifier les auteurs du massacre comme appartenant au 29e régiment de la 3e division de Panzer-Grenadiers, commandée par le generalmajor Hans Hecker.
L’affaire fut confiée au tribunal militaire de Metz qui identifia 8 militaires allemands (sur la cinquantaine qui aurait participé aux exactions). En 1950, l’instruction s’acheva mais les 8 inculpés (4 officiers, 2 sous-officiers et 2 soldats) étaient en fuite. Le jugement fut rendu le 28 mai 1952 et les condamnations furent prononcées par contumace : 4 condamnations à mort et 4 condamnations aux travaux forcés à perpétuité. Une peine de mort, celle concernant le colonel Schaefer, commandant du régiment, a été annulée en 1990, la famille du colonel étant parvenue à prouver qu'il ne commandait plus ce régiment le 29 août 1944.
Lien du jour : Hommage aux martyrs de la vallée de la Saulx